Les Oiseaux

Assise à ma table d’atelier – une grande planche de bois sur deux tréteaux Ikea – je me souviens très nettement du moment où j’ai peint le premier oiseau : le bruant à ventre jaune.

J’avais retrouvé à Pékin ma capacité de contemplation égarée sans doute lors de mon passage à l’école des Beaux-Arts puis définitivement abandonnée dans une ruelle obscure et sale pendant ma vie de jeune artiste à Paris.

Depuis ma petite cour nichée dans les vieux quartiers, je pouvais voir les branches d’un vieil arbre, le ciel et les saisons passer, des pousses de cucurbitacés, qui, en fin d’été, poussaient l’aventure jusque sur mon toit. Je me suis petit à petit rendue compte qu’on entendait les oiseaux. Cette résistance verte à la ville tentaculaire m’enchantait et j’adorais toutes ces formes d’insubordination végétale.

J’avais perdu le dessin manuel, j’avais un peu honte. Je me demande en écrivant ces lignes si je l’avais déjà possédé.

J’ai finalement trouvé assez d’apaisement et de courage pour m’assoir sur un tabouret face à ma grande table et accomplir ces gestes simples : prendre un crayon, dessiner très légèrement les contours d’un oiseau, gommer peut être, recommencer, m‘y reprendre à deux trois fois pour obtenir la forme que je cherche, mettre un peu d’eau dans un pot de yaourt en verre vide, ouvrir ma palette d’aquarelle à peine utilisée, tremper un pinceau dans l’eau puis le poser, le frotter doucement sur une pastille de couleur et peindre cet oiseau.